[Cas pratique] GIN : l’apport du travail à pied dans la préparation du poney d’école

J’inaugure avec cet article un nouveau format sur le blog : les cas pratiques ou témoignages. Chaque mois, j’essaierai de vous présenter un cheval, un humain ou un couple cheval/humain que j’ai eu l’opportunité d’accompagner pour vous montrer le chemin parcouru ensemble.

Pour cette première, je souhaitais vous présenter le cas de Gin, une ponette que j’ai eue au travail à pied puis monté, afin de la préparer au mieux à sa carrière de ponette de club.

Gin, une jeune ponette pour prendre la relève

Contexte & objectifs

Gin est une jeune ponette de 3 ans qu’une cliente, propriétaire et gérante d’un petit poney-club familial où je donne cours, a acheté au cours de l’été 2019 en même temps qu’une autre ponette D, pour prendre la relève de poneys qui sont proches de la retraite.

L’objectif en achetant Gin était de prendre un jeune poney déjà débourré mais à former pour pouvoir faire son éducation directement au poney-club. Elle a également vocation a emmener certains petits cavaliers en concours d’ici quelques années. Ma cliente a l’habitude de former ses poneys ainsi et de les garder toute leur vie chez elle, en activité pour le club puis à la retraite.

Le choix de Gin s’est porté sur une ponette qui paraissait porteuse sans être trop grande, jolie avec de bons aplombs et déjà à l’aise aux 3 allures. Le problème ? L’achat s’est fait sur vidéo et photos, et il n’y a pas eu d’essai…

L’arrivée au poney-club : une éducation à refaire

L’arrivée au poney-club

Après son arrivée au poney-club, Gin a passé plusieurs jours tranquilles pour se remettre du voyage et du changement de maison. Elle a eu le temps de se familiariser avec le poney-club pendant une semaine, dans un box avec vue sur la cour et des séances de liberté et longe dans les différentes aires de travail. La ponette était plutôt calme, compte tenu des conditions, mais vive.

La première séance

Lorsqu’est venu le moment de la mettre sous la selle, nous l’avons détendue en longe. Il m’est alors apparu clairement que sa vivacité n’était pas juste liée à l’énergie de son âge : elle stressait et fuyait. Sous la selle, nous n’avons rien pu faire d’autre qu’un tout petit tour dans la carrière tenues en longe : ma présence sur son dos semblait la stresser énormément. Je suis donc rapidement descendue – ce qui m’a valu un petit moment de solitude car le passage de jambe au-dessus de la croupe lui a fait très peur.

A la fin de cette séance, nous avons fait le bilan :

  • la ponette était bien plus vive que prévue,
  • cette vivacité n’était pas uniquement dûe à son énergie mais à du stress et de la fuite,
  • la présence de l’homme sur son dos n’était pas acquise, ce qui ne permettait pas d’envisager de la mettre en reprise avant de retravailler,
  • l’éducation à pied et en longe était à parfaire également.

Re-débourrer Gin : l’apport du travail à pied

Les objectifs de travail

Pour résoudre cette situation, il me semblait essentiel de travailler à pied aux côtés de Gin. Ma cliente souhaitant également la faire travailler montée comme l’autre ponette qu’elle avait achetée, je lui ai conseillé un cavalier spécialisé dans les jeunes chevaux qui a pris les deux au travail.

De mon coté, je me suis attelée à reprendre l’éducation de Gin à pied. J’ai procédé par étapes progressives :

  • contrôle des pieds : j’ai utilisé tout un tas d’exercices, allant du reculer au licol jusqu’au désengagement, en passant par le passage dans les passages étroits,

  • confiance : j’ai beaucoup travaillé sur la désensibilisation à tout ce qui semblait créer du stress chez Gin, allant des brosses à mon stick, en passant par les plots, chaises, et bruits,

  • connexion : avant même de travailler ces deux points, Gin se connectait facilement à moi. Lorsque le contrôle et la confiance ont été bien installés, j’ai pu observer que la connexion n’en était que meilleure.

Succès & difficultés

🚀 Dès les premières séances, j’ai observé que Gin apprenait extrêmement vite (l’avantage des jeunes chevaux !). En quelques répétitions, je parvenais à obtenir une jument plus décontractée, qui avait compris ce que j’attendais d’elle. Elle montrait nettement des signes de relâchement. Il y a tout de même eu quelques passages délicats, notamment sur le reculer à distance et le désengager, Mademoiselle n’appréciant pas que je prenne le contrôle de ses pieds. En quelques essais, cela a été réglé.

Pour cela, j’ai dû à veiller à mon langage corporel : je devais doser et en faire peu car ses réponses étaient toujours vives et il fallait parfois la vouvoyer. C’est une ponette très sensible qui m’a permis d’aboutir à beaucoup de subtilité dans le langage corporel : en faire peu pour obtenir beaucoup !

Gin quand on l’aborde sans finesse

Une fois que le cavalier pro a jugé qu’elle était prête pour moi sous la selle, j’ai repris Gin seule à la fois dans le travail à pied et monté, ce qui m’a permis de consolider tout le travail effectué grâce aux codes déjà installés au sol. Gin restait encore tendue sous la selle et il m’a tout de même fallu plusieurs semaines de travail pour pouvoir obtenir une ponette sereine. C’était l’étape finale pour valider les acquis et envisager de la passer dans les reprises.

Pour cela, j’ai beaucoup retravaillé la décontraction en installant de la confiance : je m’efforçais de rester détendue en toutes circonstances. Cela me permettait de réagir quand il le fallait, et tout de suite reproposer de se détendre, comme si sa réaction vive (par rapport à un bruit ou autre) n’était absolument pas un problème et qu’il n’y avait pas lieu de s’inquiéter. Si l’humain n’est pas source d’inquiétude mais de sérénité, le cheval est plus à même de prendre confiance en lui.

Le résultat : une ponette bien dans sa tête prête à intégrer les cours

Résultats à pied

Le travail avec Gin a pris plus longtemps que nous l’avions prévu au départ, car nos disponibilités pour la travailler variaient selon les semaines et sa progression sous la selle a été lente.

En quelques semaines de travail à raison de 2 séances par semaine, j’ai pu avoir une jument parfaitement à l’écoute à pied et en longe.

  • le reculer et le désengager étaient parfaitement acquis
  • en mener, elle évoluait parfaitement à mes côtés sans dépasser ni bousculer, et ne bougeait pas si je m’agitais près d’elle,
  • en liberté, elle était capable de tenir le cercle au pas et au trot autour de moi, désengager par un simple regard, pousser épaules et hanches, reculer…
  • à la longe, toutes les transitions étaient obtenues seulement à la voix

Résultats sous la selle

Sous la selle, les progrès ont été également rapides car le cavalier pro avait effectué beaucoup de travail préliminaire. 💯

En quelques séances avec elle, j’ai pu améliorer de nombreux points :

  • je pouvais évoluer aux 3 allures complètement rênes longues
  • je pouvais mimer un cavalier instable et bouger dans tous les sens sans réaction de fuite
  • je pouvais « garer » Gin près d’un plot par appel de hanches pour monter dessus, et monter des deux côtés
  • le passage des barres au sol et passages étroits ne posaient pas de problème
  • la direction à l’assiette et aux jambes commençait à s’affiner
  • toutes les transitions passaient à la voix

A deux reprises, j’ai pu intégrer un cours avec Gin pour la familiariser avec les autres poneys, évoluer avec eux aux 3 allures, la placer en tête et en queue de reprise… Toujours R.A.S ! Une élève modèle qui a donc rapidement intégré les cours Galop 4-5 du club.

Dans la cour des grands

Depuis, Gin a fait plusieurs mois de cours qui se sont bien déroulés. Si elle reste délicate, c’est parce qu’elle est particulièrement intelligente et réagit très vite. Cela lui permet d’apprendre rapidement et doit donc être montée par des cavaliers fins qui sauront réagir correctement. Son dynamisme en fait une excellente ponette pour ces niveaux. Avec un peu de métier, elle pourra bientôt évoluer sur de plus petits niveaux sans problèmes.

De mon côté, c’est une jeune jument qui m’a beaucoup apporté. La former à pied puis montée, obtenir des réponses aussi fines, voir l’évolution de son comportement puis le plaisir des cavaliers qui l’ont montée sont autant de satisfactions liées au travail effectué. Et pour être honnête, c’est exactement le genre de ponette que j’aurais aimé acheter pour moi, mais ma cliente n’a pas accepté 😛